Un jour, un parcours : Manon, 24 ans, chargée de communication en édition jeunesse !

03:18:00

Manon est une pétillante et chouette jeune femme qui était dans ma classe en khâgne : elle cubait alors, et je me rappelle d'elle à la fin de l'année, préparant son projet d'orientation. Nous n'avions que très peu le temps de discuter mais je me souviens d'elle comme d'une personne très à l'écoute, avec une vraie envie d'évoluer, et surtout, une incroyable balance avec sa vie personnelle bien remplie de voyages entre autres ... Elle a eu la gentillesse de faire partie du projet "un jour, un parcours" et revient sur ses années lycées et ce qui s'en est suivi ! 

Pourquoi le bac L ? Quelles difficultés ? 
Quels conseils pour les bacheliers ?

Le choix du bac L était pour moi assez évident. En Seconde et pendant toutes mes années collèges, j’étais loin d’être ce qu’on appelle une « bonne élève » : je séchais les cours, j’accumulais les heures de colles et mes notes étaient souvent médiocres, voire carrément mauvaises. Sauf en Français, où j’étais toujours la meilleure. En seconde, je manquais beaucoup les cours et à la fin du premier trimestre, la  CPE du lycée a convoqué ma mère pour lui dire qu’il fallait envisager une réorientation en bac pro. Mes professeurs de français et d’histoire-géo s’y sont opposés car dans leurs matières mes résultats étaient très bons, et ils voyaient bien que je m’investissais dans ces cours là. J’ai donc fait des efforts pour avoir des résultats corrects en langues afin de pouvoir passer en 1ère L. À partir de mon entrée en filière littéraire, mon profil a radicalement changé : je suis passée d’élève à problèmes à première de la classe. Moi qui n’avais jamais fait mes devoirs, j’ai commencé à passer mes week-ends à la bibliothèque. J’ai eu des profs géniaux, j’ai découvert des livres qui m’ont marqué à vie… et j’ai finalement eu mon bac avec 15,5 de moyenne ! Si j’avais un conseil à donner aux jeunes lycéens : faites ce que vous aimez, allez là où vous vous sentez bien sans écouter vos parents ni les conseillers d’orientation. 

Vos choix sur APB : est ce que tu étais sûre de ce que tu voulais faire,
 as tu eu tes choix principaux ?

En ce qui concerne mon orientation après le bac, c’est ma prof de lettres en 1ère L qui m’a pour la première fois soufflé l’idée de la classe préparatoire. Sur le coup, j’étais flattée mais j’avoue que j’ai pris ça à la rigolade. À peine deux ans auparavant, on voulait m’envoyer en CAP coiffure alors l’Hypokhâgne ça n’était clairement pas pour moi ! Et puis, en Terminale, ma prof de philo m’a reparlé de la prépa. À vrai dire, je ne savais pas bien ce que c’était, à part que c’était un nom qui faisait peur.  J’ai fini par me lancer, surtout, je dois l’avouer, parce que je ne savais pas bien quoi faire d’autre. Pour moi, le choix de la prépa, c’était surtout une façon de repousser à plus tard le moment où j’allais réellement devoir choisir ce que je voulais faire. Je n’ai jamais eu l’ambition d’intégrer une grande école derrière. Comme le lycée où j’étais disposait d’une prépa littéraire, je n’ai pas cherché à intégrer un grand lycée parisien. Je considérais que c’était une chance de pouvoir faire sa prépa à quelques mètres de chez soi, j’ai donc sauté sur l’occasion.

 L'arrivée dans les études supérieures ? Quelles appréhensions ? Quels conseils ? Quel rapport au travail, à la difficulté? Y'a t'il eu des envies d'abandons, des changements de parcours? Pourquoi ?

Avant d’arriver en Hypokhâgne, j’étais terrorisée à l’idée de ne pas être à la hauteur. J’avais peur de me retrouver à nouveau à la ramasse, comme au bon vieux temps des équations en Seconde ! Finalement, dans ma petite prépa de banlieue, j’avais tout à fait ma place. J’avais l’habitude de beaucoup travailler en Terminale, je n’ai donc pas eu de « choc » en arrivant en prépa. Mon année d’Hypokhâgne s’est d’ailleurs déroulée sans grande difficulté. J’ai rapidement eu des notes tout à fait correctes (voire parfois très bonnes) notamment dans mes matières « fortes » (Philosophie, lettres, langues). C’est en Khâgne que les choses se sont gâtées. C’est vrai que je n’étais pas prête à travailler d’arrache pieds au détriment de ma vie personnelle et au bout d’un moment mes acquis du lycée n’ont plus suffit. Ce qui était le plus décourageant, c’était de voir que certains élèves qui étaient largement en dessous de moi dans le classement au début de l’Hypokhâgne m’avaient dépassé haut la main. J’avais l’impression de ne pas progresser.
Puis, j’ai décidé de cuber. Encore une fois, c’est un choix qui me permettait de ne pas choisir, au sens où je restais dans une formation très généraliste où tout était encore possible. Mais mon année de cube m’a aussi permis de progresser. Ce qui a été le plus difficile cette année là, c’est que j’ai finalement dû me confronter à la question que j’esquivais depuis des années : « Qu’est-ce que je veux faire après ? ». Je voyais l’année défiler sans trouver de réponse à cette question et ça me donnait des bouffées d’angoisse. Je savais que la carrière de professeur n’était pas pour moi, de même que la recherche. Finalement, à la fin de l’année, j’ai voulu m’inscrire en fac de lettres, faute de mieux. Au moment de postuler sur le site de la Sorbonne, ils proposaient plusieurs masters différents et j’en ai repéré un qui s’appelait « lettres appliquées aux métiers de l’édition et de l’audiovisuel ». Je me suis renseignée sur Internet et je me suis dit « tiens, ça a l’air pas mal ». C’est comme ça qu’après des années de doutes et d’angoisse, j’ai choisi mon orientation ! Complètement par hasard.
            Ce qui me plaisait dans ce master, c’était que c’était professionnalisant tout en restant théorique, littéraire. D’ailleurs, je le recommande à tous les gens qui sortent de Khâgne et qui veulent se professionnaliser en douceur (ils proposent plusieurs parcours : journalisme, édition, audiovisuel, communication). L’année se compose d’un semestre de cours et d’un semestre de stage. J’ai trouvé les cours très intéressants, mais j’étais frustrée par le rythme de neuf heures par semaine (après trois ans de prépa, le choc est rude !).  Le plus difficile, ça a été la recherche de stage. Les personnes qui avaient déjà fait un stage en licence étaient clairement avantagés par rapport à ceux qui sortaient de prépa (nous étions nombreux dans ce cas là). Finalement, j’ai trouvé un stage aux éditions Glénat. Je m’occupais des relations presse pour les beaux-livres et les livres jeunesse de la maison. Ça n’était clairement pas mon premier choix, et pourtant ça a été une révélation : j’ai adoré travailler en communication et j’ai adoré le milieu de la littérature jeunesse ! J’ai découvert de véritables pépites, et j’ai adoré baigner à la fois dans le texte et l’image, le dessin. J’ai pris confiance en moi et pour la première fois de ma vie, j’avais le sentiment de savoir ce que je voulais faire.
            J’ai finalement changé de master en deuxième année car celui de la Sorbonne n’était pas assez professionnalisant. Je savais que les masters de Villetaneuse étaient les plus  réputés dans le milieu de l’édition. Ce master propose deux parcours : politique éditoriale (pour ceux qui se destinent au métier d’éditeur) et commercialisation du livre (tous les autres métiers de l’édition). J’ai choisi cette deuxième option car c’était la communication qui m’intéressait. Ce qui est le plus intéressant, c’est qu’on a la possibilité de faire ce master en apprentissage. Pour trouver un métier dans l’édition, c’est l’expérience professionnelle qui prime donc c’était essentiel pour moi qui n’avais fait qu’un stage de six mois. J’ai fait mon apprentissage au service communication des éditions Bayard et Milan (Un des plus grands groupes d’édition jeunesse en France). Dans ma classe, les élèves travaillaient tous dans des maisons différentes (Gallimard, Flammarion, Seuil, Nathan, mais aussi des toutes petites maisons) et à des postes différents (Cession de droits,  marketing, diffusion et même en librairie !). Pour moi, c’est ce qui a été le plus enrichissant dans ce master car on apprend beaucoup de nos expériences respectives.
            Au printemps dernier, ma maître d’apprentissage (directrice de la communication aux éditions Bayard et Milan) est tombée enceinte de son troisième enfant et est partie pour un long congé maternité de huit mois. Elle m’a proposé de la remplacer pendant son absence et mon contrat d’apprentissage s’est ainsi prolongé en C.D.D. Je suis donc passée directement du statut d’étudiant à celui de cadre, à un poste qui comprend beaucoup de responsabilités car je dois gérer seule le lancement de tous les livres qui sortent chez nous (plus de 50 par trimestre), manager une stagiaire et une apprentie qui sont à peine plus jeunes que moi, etc.  Mon rôle est de faire en sorte que nos livres soient le plus visibles dans les médias en contactant les journalistes, en leur donnant envie de lire et de parler de nos livres. Pour cela, je rédige des communiqués de presse, j’organise des événements, des rencontres. En ce moment, je travaille sur la sortie du nouveau film de Tim Burton car il est adapté d’un de nos livres. C’est vraiment très intéressant et je suis très heureuse d’avoir eu cette opportunité même si cela comprend beaucoup de pression et de difficultés en début de carrière.

 Pour conclure, je conseillerais à tous les étudiants d’avoir confiance en eux, et de ne pas avoir peur de se lancer. Mon parcours est la preuve qu’on peut trouver sa voie par hasard, par tâtonnement et de toutes façons, les parcours les plus intéressants sont souvent ceux qui comprennent le plus de rebondissements ! 

Manon a ce profil que je ne connais pas vraiment, celui de quelqu'un qui a un peu tâtonné pour trouver sa voie et qui est aujourd'hui très heureuse dedans ! J'espère que ceux d'entre vous qui perçoivent encore la prépa comme un milieu difficile ou ceux qui s'inquiètent car ils ne savent pas précisément ce qu'ils veulent faire se rassureront en observant combien Manon est aujourd'hui épanouie et à sa place ;) 
  

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