Méthodologie de la composition française : une introduction réussie sur un sujet de dissertation.
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On m'a fait remarquer il y a peu que je n'avais pas vraiment donné d'exemples à ma méthodologie de la composition française. Je partage donc ici une introduction réussi sur le sujet suivantn, fait en novembre 2015.
Dans son Discours à l’Académie suédoise, NRF, Gallimard, 2015, p.21, Patrick Modiano définit ainsi le « travail du romancier » :
« Son imagination, loin de déformer la réalité, doit la pénétrer en profondeur et révéler cette réalité à elle-même, avec la force des infrarouges et des ultraviolets pour détecter ce qui se cache derrière les apparences. Et je ne serais pas loin de croire que dans le meilleur des cas le romancier est une sorte de voyant et même de visionnaire. Et aussi un sismographe, prêt à enregistrer les mouvements les plus imperceptibles. »
Je ne me prêterai pas au travail d'analyse de cette citation, mais je partagerai seulement mon introduction qui le fait quelque peu ressentir. Je rappelle que l'introduction ne connait pas de paragraphes, qu'elle peut être assez longue (la mienne fait environ deux pages) et qu'elle demande de passer par les points suivants (je les numérote afin que vous puissiez les retrouver .
1. Une accroche
2. L'amorce de la citation
3. La citation complète
4. l'analyse du sujet
5. La problématique
6. Le plan
"1Dans un de ses essais sur le roman, Emile Zola écrivait " l'imagination n'est plus la qualité maîtresse du romancier" ajoutant, "Personne ne s'est avisé d'accorder de l'imagination à Balzac et à Stendhal, on a parlé de leur faculté puissante d'observation et d'analyse". Y'a-t-il une réelle pertinence, pourtant, à opposer imagination et capacité d'analyse ? 2Dans un discours prononcé suite à son attribution du Prix Nobel de 2014, Patrick Modiano semblait vouloir allier ces deux facultés, déclarant ainsi, à propos du romancier3 « Son imagination, loin de déformer la réalité, doit la pénétrer en profondeur et révéler cette réalité à elle-même, avec la force des infrarouges et des ultraviolets pour détecter ce qui se cache derrière les apparences. Et je ne serais pas loin de croire que dans le meilleur des cas le romancier est une sorte de voyant et même de visionnaire. Et aussi un sismographe, prêt à enregistrer les mouvements les plus imperceptibles. » 4La définition du rôle du romancier pour l'auteur français est d'apparence simple : le romancier, s'il fait usage d'imagination, n'est pas de ceux qui déforment la réalité, mais entend au contraire extraire, tirer du réel des vérités dont la réalité elle-même n'est pas consciente. Pourtant, l'on devine aisément nombre de tensions dans cette assertion : il y a toujours une tendance à opposer l'imagination, c'est à dire la formation d'images, donc la création d'autres réels, à au contraire une visée plus naturaliste, plus réaliste du réel où il n'est plus fait appel aux réalités extérieures, mais au contraire à une exploration du réel. Pourtant ici, Modiano entend, de manière quelque peu singulière, utiliser l'imagination dans une visée d'exploration des secrets cachés derrière les apparences ! De plus, que penser de ce double rôle du romancier, tout à la fois "voyant, visionnaire" - Rimbaud n'est jamais bien loin- donc presque poète, et "sismographe" donc fin transcripteur des variations, des "images" invisibles aux yeux des hommes? Dans une complémentarité des deux penchants du romancier, le terme de sismographe, pourtant d'un vocabulaire scientifiques, entend faire du romancier, l'homme capable de retranscrire les ondes auxquelles il est sensible, ajoutant une forme aux formes déjà présentes dans le réel.5 L'on se demandera ainsi si penser le roman comme un "sismogramme" du réel, c'est à dire nouvelle forme imaginée afin de retranscrire les inaudibles perceptions du réel, à la seule force des capacités poétiques et d'analyse du romancier, ne revient pas à enfin réconcilier les deux parts du romancier, mais aussi à réconcilier le roman du réel avec l'imagination. 6Si l'on se proposera dans un premier temps d'étudier en quel sens Modiano imagine avant tout sonder le réel à travers l'imagination du romancier qui n'entend donc pas s'éloigner de notre réalite, il faudra pourtant prendre en considération nombre de critiques, qui n'entendent ni faire du roman un objet de révélation scientifique, ni reléguer l'imagination à un simple rôle d'outil de révélation. Mais ces critiques se basant sur une distinction manichéenne entre imagination, poésie, d'un côté, et réalisme, science et analyse du réel de l'autre, un troisième temps de cette réflexion nous amènera à penser un romancier tout à la fois analyste et poète du réel, donc capable d'apporter, avec son imagination, de nouvelles formes, d'autres mondes à même de discuter le réel."
Pourquoi ça marche ?
- Cette introduction reprend toutes les grandes étapes d'une introduction classique et réussie : elle évoque un contexte plus large, avant de mettre en valeur la thèse d'un auteur, de la discuter, de l'analyser puis d'en sortir une problématique et un plan.
- Elle donne la citation entière, puisque la tronquer peut nous éloigner de l'essence, d'un mot d'une phrase du sujet qui avaient énormément d'importance.
- Elle n'hésite pas à montrer quelques difficultés, elle reprend sans cesse les paradoxes, les contraires de ce sujet.
- Elle montre une sensibilité : le terme de "voyeur", le terme de "sismographe" sont assez singuliers.
- Elle ne comporte pas de fautes (ehhh non, même dans la version originale) puisqu'elle a une importance cruciale dans la notation.
- Elle reprend le style de l'auteur : dans la problématique, le vocabulaire scientifique est repris et on parle de roman comme "sismogramme". Adopter le style de l'auteur montre que vous avez réellement été sensible.
J'espère que cette exemple d'introduction guidera vos prochains devoirs et dissertations !
Bonne lecture et à très vite !
Anissa E.
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